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Inaptitude : les apports de la rentrée 2025

  • Une mention équivalente, même si non identique à celle prévue par la loi, peut dispenser l’employeur de son obligation de reclassement

Lorsqu’un salarié est déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, l’employeur est en principe tenu de rechercher un poste pour le reclasser, poste devant respecter un certain nombre de critères.

Par exception, la loi prévoit que l’employeur est dispensé de son obligation de reclassement lorsque l’avis du médecin du travail porte l’une des deux mentions expresses prévues par la loi : soit « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé », soit « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi » (cf. article L. 1226-2-1 pour les maladies « ordinaires » ; article L. 1226-12 pour les accidents du travail et maladies professionnelles).

Que se passe-t-il lorsque le médecin du travail ne reprend pas mot pour mot l’une de ces deux mentions ?

Dans un arrêt du 12 février 2025, la Cour de cassation a précisé que le médecin du travail n’est pas tenu de reprendre à l’identique la mention expresse telle que prévue par le Code du travail pour dispenser l’employeur de son obligation de reclassement (Cass. soc. 12 février 2025, n° 23-22612).

Dans cette affaire, le médecin du travail avait rendu un avis d’inaptitude et indiqué que « l’état de santé du salarié ne permet pas de faire des propositions de reclassement au sein de l’entreprise, filiale et holding compris, et le rend inapte à tout poste ».

L’employeur avait considéré que cette mention le dispensait de son obligation de reclassement. Le salarié avait contesté son licenciement et soutenait que la mention visée par le Code du travail n’avait pas été reprise à l’identique par le médecin du travail, de sorte que l’employeur aurait dû rechercher un reclassement.

La Cour de cassation approuve les juges d’appel d’avoir retenu que l’employeur était dispensé de rechercher un reclassement, considérant que la formule utilisée par le médecin du travail était « équivalente » à la mention prévue par la loi.

Dans cette affaire, le fait que le médecin du travail ait pris soin de préciser qu’il n’était pas possible de reclasser le salarié « au sein de l’entreprise, filiale et holding compris » a été déterminant.

On sait en effet que lorsque le médecin du travail se contente d’indiquer dans un avis d’inaptitude que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout emploi dans l’entreprise », la dispense n’est pas totale et l’employeur doit alors rechercher un reclassement au-delà de l’entreprise, notamment dans les autres filiales du groupe auquel elle appartient (Cass. soc. 13 septembre 2023, n° 22-12970).

La prudence est donc de mise pour l’employeur lors de la lecture des avis d’inaptitude : seule l’une des deux mentions prévues par la loi ou une mention strictement équivalente à celles-ci le dispense de son obligation de rechercher un reclassement.

  • Un nouveau modèle d’avis d’inaptitude prochainement en vigueur

Un nouveau modèle d’avis d’inaptitude – qui devrait d’ailleurs faciliter l’identification d’une dispense de reclassement – entrera prochainement en vigueur, afin de prendre en compte les évolutions jurisprudentielles récentes, notamment la dispense de consulter le CSE en cas de dispense de reclassement (voir notre actualité du 02/07/2022).

Ce modèle contiendra notamment la précision suivante, accolée aux deux cas de dispense de reclassement : « Cas exceptionnel privant le salarié de son droit à reclassement par l’employeur et actant son licenciement sans consultation du CSE sur les propositions de reclassement. »

Ce modèle, ainsi que les nouveaux modèles d’avis d’aptitude et de proposition d’aménagement de poste, avaient été établis par un arrêté du 26 septembre 2024, publié au JO du 10 octobre 2024. Cet arrêté a toutefois été abrogé par un second arrêté du 5 novembre 2024, pour des raisons techniques liées au déploiement informatique de ces nouveaux formulaires.

Leur entrée en vigueur a donc simplement été repoussée et devrait intervenir fin avril ou début mai 2025.

  • Pas de maintien de salaire par l’employeur lors d’un arrêt de travail post-inaptitude

Lorsqu’un salarié est déclaré inapte par la médecine du travail et qu’il n’est ni reclassé ni licencié dans un délai d’un mois, l’employeur a l’obligation de reprendre le versement de son salaire (cf. articles L .1226-4 et L. 1226-11 du Code du travail).

Dans l’intervalle, que se passe-t-il si le salarié se voit prescrire un arrêt de travail après avoir été déclaré inapte ?

La Cour de cassation s’est prononcée récemment sur cette question (Cass. soc. 29 janvier 2025, n° 23-18585).

Dans cette affaire, un salarié en arrêt de travail pour maladie non-professionnelle depuis près d’un an, avait été déclaré inapte par le médecin du travail lors d’une visite de reprise le 13 avril 2017.

Dès le lendemain de l’avis d’inaptitude, le salarié avait fait l’objet d’un nouvel arrêt de travail du 14 avril au 28 mai.

Conformément à son obligation légale, l’employeur avait repris le versement de son salaire un mois après l’avis d’inaptitude (à compter du 13 mai). En revanche, il n’avait pas maintenu le salaire en vertu du dernier arrêt de travail, c’est-à-dire à partir du lendemain de la visite médicale ayant conclu à l’inaptitude du salarié (du 14 avril au 12 mai).

Licencié le 30 juin, le salarié a saisi les juges prud’homaux d’une demande de rappel de salaire pour cette dernière période. Le salarié s’appuyait sur les dispositions conventionnelles alors en vigueur au sein de l’entreprise employeur – la Convention collective des ingénieurs et cadres de la Métallurgie – qui prévoyaient un maintien de salaire en cas d’absence pour maladie pour les salariés ayant une ancienneté supérieure à 1 an.

La Cour d’appel a rejeté sa demande, considérant que la présence d’un avis d’inaptitude faisait obstacle à ce que son arrêt de travail du 14 avril 2017 ouvre une nouvelle période de suspension du contrat de travail et un droit à maintien de salaire.

La Cour de cassation a approuvé ce raisonnement. Elle a jugé qu’à partir du moment où un avis d’inaptitude est rendu, le salarié bascule dans le régime légal de l’inaptitude et ne peut plus se prévaloir d’une suspension du contrat de travail pour maladie et de l’éventuel régime conventionnel de maintien de salaire correspondant.

Par conséquent, lorsque le salarié bénéficie d’un arrêt de travail postérieurement à l’avis d’inaptitude, les dispositions conventionnelles relatives au maintien de salaire en cas d’arrêt maladie ne lui sont plus applicables.

Jusqu’à la reprise du paiement de son salaire un mois après l’avis d’inaptitude, le salarié en arrêt de travail n’est donc pris en charge que par les indemnités journalières de sécurité sociale et, le cas échéant, la prévoyance.

Cette décision rendue dans le cadre d’un arrêt de travail d’origine non-professionnelle est, selon nous, transposable au cas du salarié qui serait placé en arrêt de travail d’origine professionnelle après la déclaration de son inaptitude.

Rappelons à ce sujet que si l’inaptitude a une origine professionnelle, le salarié peut bénéficier du versement, par la sécurité sociale, d’une « indemnité temporaire d’inaptitude » (ITI) pendant la période d’attente d’un mois entre l’avis d’inaptitude et la reprise du paiement de son salaire par l’employeur.

***

Le cabinet Francou Avocats se tient à votre disposition pour vous accompagner dans toutes vos démarches liées à l’inaptitude de salariés.

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