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Congés payés : les nouvelles règles définitivement adoptées par le Parlement

Après avoir fait la une de l’actualité sociale pendant près de 7 mois à la suite des arrêts rendus par la Cour de cassation le 13 septembre 2023, les modifications des règles relatives aux congés payés vont être très prochainement introduites dans le Code du travail.

Le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union Européenne (DDAUE) a, en effet, été adopté par le Sénat le 9 avril 2024 et par l’Assemblée Nationale le 10 avril 2024.

Ce texte prévoit l’acquisition de jours de congés pendant un arrêt de travail, que ce dernier soit d’origine professionnelle ou non-professionnelle, sans condition de durée de cet arrêt.

Il s’agit d’une mise en conformité avec le droit de l’Union Européenne qui prévoit ce droit pour les salariés depuis le 1er décembre 2009, date d’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne qui confère à la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne un effet direct.

Cette tardive réforme du droit français a donc un effet rétroactif au 1er décembre 2009.

Afin de limiter les conséquences d’une telle réforme, le gouvernement français, suivant les pistes données à la fois par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE) et par le Conseil d’Etat dans son avis publié le 13 mars 2024, a utilisé trois leviers :

1/     une acquisition de congés payés limitée à 2 jours ouvrables par mois pour les arrêts d’origine non-professionnelle

2/     l’instauration d’une période de report pour la prise des congés payés

3/     un délai de forclusion pour les actions en justice portant sur les rappels de droit à congés payés

Pour les arrêts de travail d’origine non-professionnelle, l’acquisition de congés payés est ainsi limitée à 2 jours ouvrables par mois, soit 24 jours ouvrables par an. Pour les arrêts de travail d’origine professionnelle, c’est en revanche le nombre de jours acquis pour un temps de travail effectif qui s’applique, soit 2,5 jours ouvrables par mois et 30 jours ouvrables par an.

Le texte prévoit ensuite la mise en place d’une période de report de 15 mois pour la prise des congés payés, pour les salariés qui ne sont pas en mesure de prendre leurs congés du fait de leur placement en arrêt de travail.

Le point de départ de cette période de report de 15 mois varie selon que le salarié reprend ou non le travail.

S’il reprend le travail après moins d’un an d’arrêt de travail, la période de report de 15 mois courra à compter de l’information du salarié par l’employeur sur le nombre de jours de congés dont il dispose et sur la date jusqu’à laquelle ces jours de congés peuvent être pris (voirci-dessous).

Si le salarié est en arrêt de travail depuis au moins un an à la fin de la période d’acquisition, la période de report débutera à la fin de la période d’acquisition au titre de laquelle les congés payés ont été acquis.

Dans cette situation, deux hypothèses existent :

  • soit le salarié reprend le travail avant la fin de la période de report et, dans ce cas, la période de report est suspendue jusqu’à l’information par l’employeur de ses droits à congés ;
  • soit le salarié ne reprend pas le travail avant la fin de la période de report et, dans ce cas, les droits à congés sont perdus.

Il est à noter que les accords d’entreprise et les conventions collectives de branche pourront prévoir une période de report supérieure à 15 mois.

Enfin, s’agissant des droits que pourraient réclamer rétroactivement les salariés, il convient de distinguer entre les salariés toujours en poste et les salariés dont le contrat de travail a été rompu.

Pour les salariés toujours en poste, ils ne peuvent réclamer que des droits à congés, c’est-à-dire des jours de congés payés puisque le droit à congés payés ne peut pas être remplacé par une indemnité financière, sauf en cas de rupture du contrat de travail.

Le projet de loi prévoit un délai de forclusion de deux ans qui courra à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi, soit en principe le lendemain de sa publication au Journal officiel.

Pour les salariés dont le contrat de travail a été rompu, la solution est plus simple puisqu’ils ne peuvent réclamer qu’une indemnité compensatrice de congés payés et devront, selon la loi, saisir le juge dans les trois ans à compter de la rupture de leur contrat de travail.

En application de l’article L. 3245-1 du Code du travail, leurs demandes ne pourront porter que sur les sommes dues au titre des trois dernières années précédant la rupture.

Au regard de ces nouvelles règles, trois points de vigilance pour les employeurs peuvent être identifiés :

  • veiller au suivi de la paie et notamment du décompte différencié des congés payés des salariés placés en arrêt de travail selon l’origine professionnelle ou non de cet arrêt ;
  • vérifier la durée de la période de report applicable dans l’entreprise, compte tenu de la possibilité de prévoir par accord d’entreprise ou convention de branche, une période supérieure à 15 mois ;
  • et surtout, s’assurer du respect de l’obligation d’informer le salarié à son retour d’arrêt de travail du nombre de jours de congés payés dont il dispose et de la date jusqu’à laquelle ils peuvent être pris.

Sur ce dernier point, il est à noter une évolution louable du texte par la Commission mixte paritaire (CMP) réunie le 4 avril 2024 qui a fixé un délai d’un mois à compter de la reprise du travail par le salarié pour l’accomplissement de cette formalité d’information. Le délai initialement prévu par le projet de loi était de seulement 10 jours.

La CMP a également précisé que cette obligation, qui doit être réalisée par « tout moyen conférant date certaine à la réception de cette information », pourrait notamment se faire au moyen du bulletin de paie. Dans ce cas, si le nombre de congés payés acquis figure habituellement sur le bulletin de paie, il conviendra de veiller à préciser également sur ce bulletin la date jusqu’à laquelle les congés payés pourront être pris.

L’entrée en vigueur du projet de loi définitivement adopté par le Parlement le 10 avril 2024 est désormais soumise à sa publication au Journal officiel, sous réserve d’une saisine du Conseil constitutionnel.

Compte tenu de la décision n° 2023-1079 QPC rendue par le Conseil constitutionnel le 8 février 2024, il est, à notre avis, probable que le projet de loi « passe » sans grande difficulté le contrôle de constitutionnalité.

Affaire à suivre.

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